Groupement d'intérêt public de recherche dans les domaines de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et de l'habitat

L’encadrement juridique de l’habitat flottant (2019)

L’encadrement juridique de l’habitat flottant
Mémoire rédigé dans le cadre du Master II Professionnel Droit Immobilier
 
Présenté et soutenu par Eva Riou, le 27 septembre 2019
Sous la direction de Madame le Professeur Becqué-Ickowicz et Monsieur François Barloy
 
 
Après des décennies de grands travaux destinés à protéger leur territoire face à la montée des eaux, nombreux sont les pays qui expérimentent de nouvelles stratégies afin d’allouer
davantage de place à l’eau sur les espaces qui sont menacés. Il s’agit en effet désormais d’accepter l’eau plutôt que de la repousser et de concevoir pour ce faire, des dispositifs qui
l’intègrent à l’espace urbain. A ce titre, l’habitat flottant semble constituer une réponse adaptée face aux risques climatiques actuels et à la montée des eaux. 
 
Le changement climatique, la pression démographique et foncière, la recherche constante de valorisation du domaine public ainsi que les préoccupations environnementales sont autant d’injonctions contradictoires qui doivent être conciliées préalablement à l’implantation de maisons flottantes. 
 
Cette nouvelle forme d’habitat, dénuée d’emprise au sol, fait naître une réflexion portant sur la problématique fondamentale de classification de droit des biens et incite à s’interroger sur le contour des notions de construction et d’ouvrage. De surcroît, une forte casuistique existe en matière d’habitat flottant, laquelle résulte de la variété des procédés constructifs et de celle de ses lieux d’implantation potentiels. 
 
La maison flottante fixée à des pieux ainsi que la maison amphibie sont des immeubles par nature en raison de leur ancrage manifeste au sol. Ces dernières sont unanimement considérées comme des constructions et soumises à l’obtention préalable d’une autorisation d’urbanisme. De même, la qualité d’ouvrage ne peut leur être refusée, ce qui implique qu’elles soient soumises à la responsabilité spécifique des constructeurs et à l’obligation  d’assurance concomitante. 
 
Quant à la maison reposant sur un plancher flottant, la qualité d’immeuble par destination pourra lui être reconnue uniquement lorsqu’elle sera implantée en eaux privées. De même, la notion de construction ne se limitant pas à la seule emprise terrestre, cette dernière ne pourra  se soustraire à l’obtention préalable d’une autorisation d’urbanisme dès lors qu’elle a vocation à être implantée à perpétuelle demeure. La situation sera cependant tout autre, lorsque celle-ci sera située sur le domaine public fluvial ou maritime. Cette dernière conservera la qualité de meuble par nature et seule une autorisation d’occupation temporaire sera nécessaire. En tout état de cause, il serait opportun de procéder à l’élargissement de la notion d’ouvrage afin que puisse y être intégré ce type d’habitat et qu’il entre par là même, dans le champ d’application des articles 1792 et suivants du Code civil.
 
Implanté sur une propriété privée, le traitement réservé à l’habitat flottant n’a pas vocation à s’éloigner de manière considérable du régime applicable aux immeubles bâtis traditionnels. A
cet égard, il serait souhaitable, qu’à terme, ces deux supports que sont le sol et l’eau soient traités de manière indifférenciée.
 
Lorsque l’habitat flottant est implanté sur le domaine public fluvial et maritime, les collectivités territoriales sont tiraillées entre limiter les espaces bâtis ou envisager un
renouveau dans l’organisation et l’usage des espaces littoraux. Leur capacité à faire face aux aléas climatiques est en effet fortement dépendante des modes de gestion et de planification urbaine mis en oeuvre. La gestion du risque lié aux submersions incite le développement d’innovations dans la conception et les techniques constructives, l’habitat flottant en est un parfait exemple. Cette nouvelle forme d’habitat permet en outre d’assurer une mise en valeur récréative et environnementale du domaine public.
 
Il est indéniable que les nouveaux outils d’aménagement offrent une grande liberté aux maîtres d’ouvrage. Leur articulation avec les procédures d’évaluation environnementale et de
concertation du public devront cependant être soigneusement déterminées et ce, afin de prévenir toute dérive face à des opérations d’aménagement qui feraient fi des enjeux environnementaux actuels. La planification urbaine initiée par les intercommunalités tiendra donc une place déterminante dans le développement et l’implantation raisonnée d’habitats flottants sur le domaine public, perpétuel objet de convoitises.
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